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Violences pré-électorales : après les incidents de Labé et Kankan, les guinéens craignent le pire

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La Guinée plane actuellement au dessus d’un brasier. Il suffit d’une petite maladresse pour que tout s’embrase. Or depuis quelques jours la situation est montée crescendo. Les tensions sont devenues soudainement très vives. Les récents incidents au Foutah et en Haute Guinée sont les prémices d’un chaos à la veille d’un scrutin présidentiel très controversé prévu le 18 octobre prochain.

A une semaine du vote, les guinéens sont en passe de basculer dans le précipice. Pis, cette situation à la fois délétère et traumatisante est créée et entretenue par les deux principaux belligérants, le candidat sortant Alpha Condé et son principal challengeur Cellou Dalein Diallo.

L’un veut à tout prix confisquer le pouvoir tant disque l’autre veut à tout prix l’arracher. Un véritable choc des titans qui usent sans vergogne du ‘’bétail électoral’’ pour s’affronter.

Envahis par la boulimie du pouvoir, ils sont prêts à tous les sacrifices pour arriver à leur fin. Même s’il faut mettre le feu aux poudrières ou faire un bain de sang. Pourvu que l’objectif visé soit atteint. Tant pis pour les conséquences. Car pour eux, seule la fin justifie les moyens.

 « Guerre », ce mot de six lettres qui veut mettre aujourd’hui le feu au pays a été utilisé pour la première fois dans cette campagne électorale par les deux mastodontes de l’échiquier politique guinéen.

Des discours belliqueux et haineux à relent ethnique tenus par les deux adversaires sont les prémices de la détérioration de la situation actuelle, qui entrainent ce petit pays de l’Afrique l’ouest à des escalades de violences verbales à l’affrontement.

‘’Le poisson pourri toujours par la tête’’, nous apprend-on souvent.

Tout a commencé par les mots de flèches lancés par le locataire du palais sékoutouréyah à l’endroit de son principal opposant. « Le malinké qui est candidat et qui n’est pas du RPG (parti au pouvoir) veut aider Cellou Dalein Diallo(…). Si vous voter pour lui, sachez que vous votez pour Cellou », fin de situation. Ce discours à relent purement ethnique est tenu par Alpha Condé, le 19 septembre dernier dans son bureau présidentiel, à l’intension de ses militants et sympathisants.

Une semaine après, son farouche opposant sort de sa torpeur pour réagir. Le 26 septembre 2020, face à ses militants et sympathisants au siège du parti à Commandanya Cellou Dalein Diallo à son tour se déchaine : « s’il (Alpha) veut guerre il l’aura ». C’était tout dire.

De simples paroles on en vient aussitôt aux actes. Et c’est encore les deux adversaires qui les posent.

Alpha usant de son pouvoir de chef d’Etat prend un acte, le 28 septembre 2020, pour fermer la frontière guinéo-sénégalaise. Histoire de barrer la route aux « mercenaires recrutés » par Cellou avec l’aide du voisin sierra léonais, par le truchement de son vice-président.

Et patatras ! Le lendemain 29 septembre le cortège du premier ministre et directeur de campagne du RPG Arc en ciel Dr Kassory Fofana en campagne à l’intérieur du pays est la cible d’une attaque dans la région du Foutah, fief incontesté du candidat Cellou Dalein Diallo. Des images de véhicules du cortège endommagés sont publiés et l’incident enflamme la toile et fait les choux gras des médias.

Les deux camps, RPG Arc en ciel et UFDG se rejettent la responsabilité. Chacun cherchant à tirer la couverture de son côté. Tantôt on parle d’intox tantôt on parle d’embuscade montée par UFDG. L’accusé fini par condamner tardivement les l’incident malheureux survenus dans son fief traditionnel.

Mais le mal était déjà consommé. Car de l’autre côté, dans les fiefs traditionnels du parti au pouvoir, notamment en Haute Guinée, les signes avant-coureurs d’une réaction à l’incident du foutah se sont très tôt manifestés. A travers les interventions de leur ‘’speakeurs’’ dans les réseaux sociaux et dans certains médias. Où les langues se sont très vite déliées pour fortement condamner et promettre une réponse à l’acte perçu comme une déclaration de « guerre ».

C’est pourquoi d’ailleurs, les incidents de Kankan ce dimanche 11 octobre, malgré qu’ils soient plus gravissimes ne surprennent guère l’observateur averti. D’autant plus que c’était prévisible même si on ignorait la ville où ça allait se passer. Ces incidents survenus suite au blocage du cortège de Cellou Dalein à Tokouno, une localité située à une centaine de kilomètre de Kankan, ont fait une vingtaine de blessés, plusieurs magasins et boutiques pillés, des motos confisquées et plusieurs personnes molestées et chassées.

Cette escalade de violence rappelle les évènements de 2010 suite à l’intox liée à l’affaire ‘’d’eau empoisonnée’’ et qui avait causé beaucoup de dégâts du côté de Siguiri. Des faits très malheureux qui sont encore frais dans la mémoire du pauvre guinéen.

Pourtant, depuis la veille de cette campagne électorale, El hadj Djériba Diaby à travers la fondation qui porte son nom s’est mis à pied d’œuvre pour appeler à la retenue et véhiculer le message de la paix. L’ambassadeur de la paix avec son bâton de pèlerin, a sillonné  les QG des partis politiques, de la société civile, rencontré des personnalités religieuses et autorités publiques pour  sensibiliser et arroser la graine de la paix. Mais hélas ! Tout porte à croire que les messages de paix du grand religieux n’ont pas atterri dans de bonnes oreilles.

Ce qui nous amène à croire que le pays n’est pas encore sorti de la taverne. Puisque ces violences de Kankan sont la réponse de celles de Labé et Dalaba. La réponse du berger à la bergère quoi. Ou encore la loi de talion : « Œil pour œil, dent pour dent ». Raison pour laquelle bon nombre d’observateurs pensent qu’il faut craindre le pire pour les jours à venir.

Touraman Keita pour kibanyiguinee.info

(+224) 655 27 13 18

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