PRISON FERME POUR ALIOU BAH : CETTE CHANCE QUE L’OPPOSANT GUINÉEN A, MAIS QUE D’AUTRES N’ONT PAS EUE
En Guinée, tout le monde ou presque crie au scandale depuis l’arrestation de l’opposant Aliou Bah, qui a abouti à sa condamnation à 2 ans de prison ferme. Le verdict est tombé ce mardi 7 janvier, à la suite d’un procès lapidaire dont l’issue était connue d’avance.
Jugé en flagrant délit, son procès n’a pas retardé. Il n’a duré que trois jours : le 31 décembre 2024, les 2 et 7 janvier 2025. Reconnu coupable d’offense au chef de l’État, le tribunal n’a pas été indulgent à son égard. Le verdict annoncé est lourd. Confirmant le réquisitoire du procureur, le juge audiencier lui a collé 2 ans d’emprisonnement ferme.
Contestant cet arrêt, la défense a décidé d’interjeter appel. Ce qui signifie qu’on pourrait s’attendre à un autre procès dans les jours, semaines voire mois à venir.
Quant au principal concerné, officiellement logé à l’hôtel 5 étoiles de Coronthie, Aliou Bah qualifie son procès de « politique » et se considère comme étant le « prisonnier personnel de Mamadi Doumbouya. »
Quoi qu’on dise, bon nombre d’observateurs dénoncent une « parodie de justice. » Estimant qu’Aliou Bah n’a pas bénéficié d’une justice « équitable. » Beaucoup s’accordent à dire que c’est un procès téléguidé, qui a été initié juste pour faire taire celui qui était jusque-là, l’opposant le plus critique du régime militaire.
Ce qui semble être une évidence qui crève les yeux. Néanmoins, à mon avis, Aliou Bah peut se réjouir d’être situé sur son sort. Lui qui polarise les attentions depuis son arrestation le 27 décembre dernier, purgera sa peine de 2 ans à la prison civile de Coronthie. Ça au moins, c’est connu de tout le monde.
Ça veut dire que même s’il est coupé du monde extérieur, on sait au moins où il se trouve. Sa famille biologique n’aura pas à se faire assez de soucis. Surtout sa pauvre maman, qui est inconsolable depuis l’arrestation de son fils. Elle a au moins la chance de le voir. Même si c’est dans des conditions qu’on ne souhaiterait pas. Sa femme aussi, n’a plus à trop s’inquiéter. Elle pourra régulièrement voir son mari et servir de pont de communication entre lui et ses enfants.
C’est pareil pour ses proches collaborateurs, ses amis et autres connaissances. Tous, ont la possibilité de le rencontrer.
En plus, sa sécurité relève désormais entièrement de la responsabilité de l’État. Ce qui signifie que si le moindre mal lui arrivait, l’État sera le seul et unique responsable.
Son procès pourrait donc être perçu comme un moindre mal. Un mal qui lui permettra tout de même d’être en contact avec les siens. Tout en sachant que cela ne pourrait en aucun cas justifier sa condamnation.
Une chance que lui il a, mais d’autres n’ont pas eue. Foniké Menguè, Billo Bah, Sadou Nimaga, Marouane Camara et d’autres anonymes, sont pour la plupart portés disparus depuis des mois, sans qu’on ne sache réellement ce qu’ils sont devenus.
Depuis leur enlèvement, il n’y a aucune information à leur sujet. Qui les a enlevés ? Sont-ils en vie ou morts ? S’ils sont en vie, où sont-ils détenus ? Dans quelles conditions se trouvent-ils ? Quel est leur état de santé ou moral ?
Il y a un véritable mystère autour de leur sort. Vu qu’on a aucune information fiable depuis leur disparition.
Pourtant, s’ils avaient bénéficié d’un procès, même « inéquitable », le pays irait mieux qu’il ne l’ait aujourd’hui. Leurs familles et proches vivraient avec une lueur d’espoir. On ne serait pas là à spéculer. Mais au stade où on en est, c’est le désespoir et la psychose totale dans la cité. Les gens vives dans une crainte permanente. Les rares personnes qui s’expriment disent tout sauf la vérité.
Jouant au sourd muet, en dépit des multiples pressions internes et externes, le pouvoir de Conakry, décline toute responsabilité, semblerait avoir d’autres préoccupations que d’aider à retrouver des gens dont il percevrait de surcroit comme étant des antisystème. D’où le piétinement dans les enquêtes qui seraient visiblement annoncées pour éviter les tensions dans un pays très fragilisé par l’insécurité grandissante et la méfiance des citoyens vis-à-vis de ses dirigeants.
Touraman Keita pour kibanyiguinee.info