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DESSOUS DE FERMETURE DES MÉDIAS EN GUINÉE : LE « POT AUX ROSES » DÉVOILE PAR DEUX COMMISSAIRES DE LA HAC

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Les nuages se sont un peu plus dissipés sur les dessous qui ont conduit à la fermeture de certains médias privés en Guinée. Loin de douter de la raison officielle brandie par l’Etat qui parle de non-respect du contenu des « cahiers de charge », le dernier développement de la situation montre une autre piste qui semble plus plausible. C’est l’interruption unilatérale d’un « deal » que certains patrons avaient signé avec le locataire du palais Mohamed V. Où ils émargeaient régulièrement pour empocher plusieurs centaines de milliers de dollars.

Le « pot aux roses » a été dévoilé par la Haute Autorité de Communication (HAC), l’organe de régulation des médias en Guinée. L’information est sortie de la bouche de deux de ses commissaires en mission à l’intérieur du pays. Qui ont profité d’un point de presse, à Kankan, la ville natale du chef de la transition, pour évoquer cet épineux sujet.

Les deux commissaires Djené Diaby et Ibrahima Tawel Camara, puisqu’il s’agit d’eux, se sont exprimés à cœur joie, pour tout déballer. Face à des journalistes reporters interloqués par ce qu’ils venaient d’apprendre sur le comportement de certains patrons de médias, les deux « émissaires » de la HAC se sont exprimés sans détour.

Comme s’ils étaient en mission, ils diront, dès l’entame n’avoir aucune « compassion » pour les promoteurs des médias fermés. Ils estiment d’ailleurs que ces patrons méritent bel et bien ce qui leur sort. Selon eux, les patrons de ces médias ont reçu beaucoup d’argent des mains du chef de la junte militaire guinéenne. Le « deal » c’était de l’aider à consolider son pouvoir pris par force.

« Les patrons ont eu leur part. Ce qui est caché, nous, on va vous le dire. Chacun d’entre eux a eu de l’argent à la présidence. Main en main avec Mamadi Doumbouya. Chacun d’entre eux a signé. », révèle Djené Diaby. Visiblement très remontée contre les patrons des médias concernés, cette commissaire à la HAC, qui alternait le français et maninka (langue de la région) dans sa communication, est allée plus loin dans les révélations. Elle confie que ces patrons ont reçu des enveloppes de 300 mille, 200 mille, 100 mille dollars à la présidence. Et qu’ils n’ont pas voulu faire le job. C’est-à-dire, ce pourquoi, ils ont signé. Ce qui a irrité le courroux du Général de corps d’armées. Qui n’a pas tardé à réagir avec la dernière énergie.

« Toi tu as pris 300 mille, 200 mille, 100 mille dollars avec quelqu’un et tu te mets à l’insulter, alors qu’il est plus fort que toi. Que penses-tu qu’il va faire ? », laisse-t-elle éclabousser dans les visages pales des journalistes.

Ce coup de poignard dans le dos des médias fermés est enfoncé par le commissaire Ibrahima Tawel Camara. Qui renchérit en expliquant qu’« il y en a parmi ces grands journalistes que vous connaissez, je ne citerai pas leur nom ici, qui partaient (émarger) là-bas à chaque fin de mois avec Thierno (Mamadou Bah, conseiller personnel de Doumbouya). Chacun signe, met son nom et son adresse email »

La liste de tous ces promoteurs ou journalistes ayant émargé est connue et soigneusement gardée dans les tiroirs du grand palais.

« C’est pourquoi, le jour de la fermeture des radios, certains (parmi eux) ont voulu parler. Mais dès qu’on les a rappelés de l’existence de la liste, ils se sont tuent. Parce qu’ils savent qu’ils ont pris de l’argent…», revient à la charge Djené Diaby. Selon elle, « Evasion » faisait partie de la liste des médias à fermer, mais qu’il a échappé de justesse grâce à la sagesse de son patron Laye Mady qui a vite compris pour faire profil bas.

Par ailleurs, dans sa diatribe notre commissaire révèle qu’un directeur bien qu’ayant déjà émargé a voulu gagner plus. Avec l’aide de Moussa Moise Sylla (ancien directeur de la DCI à la présidence), il a pu rencontrer le « CHEF » à qui il demanda une bonification de 100 mille euros. C’est fut une demande de trop qui mettra le patron des lieux dans tous ses états. Le petit directeur se fera remonter les bretelles et mis « chasser du bureau » comme un va-nu-pieds.

« Quand ils ont pris cet argent, il y a un directeur qui est reparti là-bas par l’intermédiaire de Moussa Moise. Il dit à Mamadi Doumbouya, je vais t’aider. Comme on parle la même langue, je vais beaucoup t’aider. Mais tu vas me donner 100 mille Euros. C’est là où Mamadi s’est énervé et lui a chassé de son bureau », fin de citation.

Le 22 Mai 2024, la junte militaire au pouvoir décide de fermer quatre médias privés guinéens. En retirant leurs agréments et licences de « Espace fm », « Sweet fm », « Fim fm » et « Djoma fm et tv » pour « non-respect des cahiers de charge. »

Au moment où affichions ce texte la HAC qui se rend compte de la gravité de cette bourde de ses deux « éléments » a pris une décision suspendant les deux commissaires pour « fautes lourdes » jusqu’à nouvel ordre. Nous y reviendrons.

Samory Keita pour kibanyiguinee.info

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