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Hommage à Maître Bassirou Barry : « Il a donné à la profession d’Avocat son âme, son essence » (Me Mohamed Traoré)

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Le Barreau de Guinée rend hommage ce vendredi 03 février 2023 à Maître Bassirou Barry, décédé il y a quelques jours à Abidjan, après une carrière bien remplie de magistrat, de haut fonctionnaire et d’avocat. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il s’agit d’un hommage amplement mérité.

En 2016 déjà, les avocats, à travers le Conseil de l’Ordre, lui avaient exprimé leur reconnaissance en lui délivrant un satisfecit pour les immenses services qu’il a rendus à la justice guinéenne en général et au Barreau en particulier. Comme quoi, il ne faut pas attendre leur mort pour rendre hommage à ceux ou celles qui se sont illustrés positivement dans un secteur donné.

C’est un devoir pour le Barreau de reconnaître l’acte  posé par Maître Bassirou Barry, alors ministre de la Justice, pour l’avènement dans notre pays d’un Barreau indépendant. Il n’a certes pas créé la profession d’avocat dans notre pays. Mais il a donné à celle-ci son âme, son essence, ce qui fait de l’avocature une profession libérale.

En effet, sous la Révolution, il existait bien des avocats. On les appelait d’ailleurs « avocats populaires ». Mais l’exercice de la profession d’avocat à cette époque est sans commune mesure avec ce qu’il est aujourd’hui. C’est en 1986, que pour la première fois, en Guinée, un texte a consacré de manière expresse le caractère libéral et indépendant de la profession d’avocat « . Quand on n’est pas avocat ou on ne connaît pas ce qu’est un Barreau indépendant, on ne peut apprécier à sa juste valeur l’importance considérable de cette réforme. Nous la devons incontestablement à Maître Bassirou Barry. Puisque, c’est lui qui a soumis au Président Général Lansana Conté, pour signature, cette ordonnance qui devait désormais régir l’exercice de la profession d’avocat.

L’acte en soi prouvait à l’époque que Me Bassirou Barry était un homme de conviction et n’a jamais cessé de l’être jusqu’en ces instants où cet hommage lui est rendu. Il était imbu de principes que même sa fonction de ministre d’alors ne pouvait l’empêcher de défendre.

En effet, il aurait pu s’opposer ou tout au moins s’abstenir de toute initiative allant dans le sens de la consécration de l’indépendance du Barreau. Il ne faut pas oublier que dans nos pays un Barreau indépendant est souvent perçu, à tort ou à raison, généralement à tort, comme un regroupement d’opposants. Mais ses convictions l’ont emporté sur sa fonction de ministre qui était éphémère alors que les principes demeurent. Bien lui en a pris d’ailleurs puisque, après avoir quitté, le gouvernement, il a intégré le Barreau pour exercer la profession d’avocat jusqu’au crépuscule de sa vie.

Le Barreau a connu des avocats extrêmement courageux, intrépides et pour qui l’indépendance n’était pas un mot vide de sens. Je veux citer entre autres Maîtres Famoro Sydram Camara, Alpha Bacar Barry et Georges Destephen, qui ne sont plus de ce monde. Que leurs âmes reposent en paix. Je veux citer aussi Maîtres Christian Sow, Mounir Houssein Mohamed Mohamed, Dinah Sampil et bien d’autres, qui ont appris aux jeunes avocats ce que doit être un avocat dans la pratique de sa profession et l’intérêt de préserver à tout prix, en tout lieu et en toutes circonstances l’indépendance de la profession. Sans un texte qui inscrivait dans le marbre cette indépendance du Barreau, rien tout de cela n’aurait être possible.

Le plus grand hommage que la jeune génération d’avocats puisse rendre à Maître Bassirou Barry est de se battre inlassablement afin que jamais, l’indépendance du Barreau ne soit remise en cause. Car il n’y a pas de Barreau, il n’y a pas d’avocat, sans indépendance.

Me Mohamed Traoré

Ancien Bâtonnier

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