Les signes avant-coureurs étaient perceptibles depuis quelques temps. Ce n’était donc plus qu’une question de jours et d’opportunité pour l’annoncer : la candidature du Général Mamadi Doumbouya. Même si ce dernier entretient pour le moment le suspens, des voix très audibles au niveau de la Présidence et du Gouvernement ont pris les devants, pour faire écho de la nouvelle.
Depuis quelques moments, des mouvements de soutiens entretenus par des grands commis de l’État sont légion dans la capitale guinéenne. Parmi eux, des artistes de renoms qui appellent publiquement à une candidature du chef de la transition et mobilisent pour sa cause. Ils profitent généralement de ses retours de voyage pour mobiliser les citoyens à coût d’espèces sonnantes et trébuchantes.
La déclaration faite la semaine écoulée, par les autorités du pays, relative à une possible candidature de Doumbouya n’est que la suite logique de ces mouvements qui pullulent de partout.
Alors qu’il avait juré la main sur les livres Saints, en signant dûment la Charte de la transition, le CNRD semble tout renier aujourd’hui, aveuglé par son désire de confisquer le pouvoir.
L’avant-projet de constitution qui en réalité, est l’antithèse de la Charte de la transition, a été conçu pour faire sauter les verrous indélébilement mentionnés dans les articles 46, 55 et 65 de ladite Charte, qui empêchaient l’homme du 5 septembre 2021 de rester au pouvoir. Surtout que telle qu’élaborée, la future constitution donne la possibilité au Patron du palais et aux membres du CNT et du Gouvernement de se présenter s’ils le désirent.
Décidées de changer les règles du jeu, aux dernières minutes du match, les nouvelles autorités ont tacitement informé la communauté internationale de leur désire capricieux. Profitant de la Conférence Ministérielle de la Francophonie (CMF), ténue à Paris, la semaine dernière, le Ministre Guinéen des Affaires Étrangères a exactement mis le curseur sur le point pour annoncer la nouvelle donne. Se référant à la future constitution, alors que celle-ci n’est qu’en phase de projet, Dr Morysandan Kouyaté a indiqué que cette constitution ne sera jamais une machine à exclure.
« Cette nouvelle constitution ne sera jamais une machine à exclure. Elle ne peut commencer dans son préambule par l’égalité de toutes les guinéennes et de tous les guinéens, en droit et en devoir, et se terminer par l’exclusion de quelques-uns selon les humeurs et calculs politiques de tels ou tels acteurs », annonce le diplomate guinéen.
Cette déclaration de Dr Kouyaté qui traduit la nouvelle tendance au Sommet de l’État Guinéen est perçue comme une volonté manifeste du CNRD de se cramponner au perchoir.
Et comme si c’était un petit topo bien cadencé, au lendemain de la sortie de Morysandan, les deux porte-paroles de la Présidence et du Gouvernement ont animé une conférence de presse à Conakry pour annoncer une possible candidature du président du CNRD à la présidentielle prochaine censée mettre fin à la transition et permettre le retour à l’ordre constitutionnel.
« Le président est un citoyen guinéen comme tout le monde. Il n’y a aucune interdiction l’empêchant de faire acte de candidature pour gouverner le pays », rengaine plusieurs fois, vendredi, le Général Amara Camara face à la presse.
Il renchérit en indiquant que « Non seulement en termes de droit », Doumbouya « a la possibilité (de se présenter) mais aussi », qu’« il y en a pleinement aujourd’hui la qualité. » Car d’après lui, la future constitution ne l’empêche nullement de candidater.
Comme animé par l’excès de zèle, le Ministre Secrétaire Général de la Présidence ira jusqu’à dire que « la fièvre Doumbouya s’est emparée de tout le monde » en Guinée.
Abondant dans le même sens, le Ministre porte-parole du Gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo, dit que Doumbouya n’est pas un « lâche », quand le moment arrivera, qu’il prendra sa décision. « Le Président que je connais…n’est pas un lâche. Le moment venu, s’il décide de se présenter, il le dira. », dit-il, avant de marteler : « Et moi je dis, pourquoi pas ? » S’inscrivant déjà dans la logique des élections, le ministre Gaoual estime qu’« aller devant les urnes, ne signifie pas usurper la volonté du peuple. »
Ces différentes déclarations faites par des grands commis de l’État prouvent à suffisance l’intention du CNRD de garder son pouvoir acquis suite à un coup de force il y a 3 ans. Après avoir pris goût au délice du pouvoir, le grand Prince du Palais ne compterait plus respecter sa parole d’honneur. Entre pouvoir et honneur, le choix est déjà fait.
Tant pis si on ravale le crachat. Le pouvoir lavera les traces de la salive. Dans l’espoir que celle-ci ne dégagera pas de la puanteur.
Touraman Keita pour kibanyiguinee.info