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LES TRAVAUX DE RÉNOVATION DU SIÈGE HOROYA EN ARRÊT DEPUIT UN AN: LES DESSOUS D’UN BLOCAGE INÉDIT !

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Lancés le 22 août 2022 en grande pompe pour un délai d’exécution de six (6) mois, les travaux de rénovation du siège du quotidien national Horoya ne sont toujours pas achevés. Exécutés à hauteur de 42% seulement, soit 600 millions gnf en valeur monétaire, ils sont en arrêt depuis maintenant un an sans murmure ni cri. A cause d’une modique somme de 300 millions gnf réclamés par la société adjudicatrice pour relancer les travaux et dont l’Etat se trouve dans l’incapacité de payer.  

Le coût de rénovation du siège du quotidien national Horoya s’élève à hauteur d’un milliards six cent millions francs guinéens (1 600 000 000 GNF). En octroyant ce marché (suite à un appel d’offre), à la société Falibra BTP, l’Etat devait en même temps l’accorder une avance pour le démarrage des travaux. Seulement pour des raisons inavouées, il n’honorera pas cet engagement. Il a fallu donc que l’entrepreneur mette la main à la poche pour préfinancer le début des travaux.

Trois mois s’écouleront sans que l’Etat ne se manifeste. Alors que les travaux sont exécutés à hauteur de 42% par l’entrepreneur. Ce silence notoire de l’Etat sera perçu par ce dernier comme un manque de volonté. Doutant ainsi de la bonne foi du partenaire, l’entrepreneur décide de marquer une pause. Mais demande en même temps d’être remboursé à hauteur de 20% sur les 42% des travaux réalisés. C’est-à-dire 300 millions sur les 600 millions GNF de préfinancement. Mais l’Etat ne s’acquittera point. Depuis, le chantier est fermé. Et un an après, les travaux n’ont toujours pas repris.

Que s’est-il passé réellement ? Où est ce que ça coince ? Qu’est ce qui a poussé l’entreprise a arrêté les travaux ? Pourquoi l’Etat refuse de rembourser l’entrepreneur ?

Ce sont tant d’interrogations qui taraudent l’esprit des travailleurs de ce service depuis plusieurs mois.

Pour comprendre, kibanyiguinee.info s’est rapproché des acteurs impliqués dans ce dossier. A savoir l’Etat qui est le maitre d’ouvrage et représenté ici par le ministère de la communication et de l’information et le maitre d’œuvre, c’est-à-dire, l’entreprise FALIBRA BTP.

Les confidences du directeur général de Horoya

Selon le directeur général du quotidien national Horoya que nous avons rencontré le premier, les choses ont démarré sur du mauvais pied. Il estime que l’erreur incombe, à la fois à l’Etat et à l’entreprise. Ainsi, sans dire le montant, il révèle que l’Etat devait payer une avance à l’entreprise pour démarrer les travaux. Chose qui n’a pas été faite, reconnait-il. Cependant, fera-t-il remarquer, lorsque l’Etat a voulu rembourser l’entreprise de son préfinancement, celle-ci aussi n’était pas en « règle » au niveau de l’ACGP.

 « Dès le départ, l’Etat devrait verser une avance à l’entreprise pour lancer les travaux, mais cela n’a pas été fait. Donc c’est l’entreprise qui a préfinancé les travaux et qui dit avoir dépensé entre 200 millions à 300 millions francs guinéens », révèle Ibrahima Koné, avant de s’empresser de préciser : « Mais, quand le département (ndlr, de la communication et de l’information) a voulu régler l’entrepreneur ce dernier n’était pas en règle. Le dossier qui devait valider le paiement de ses avances n’existait pas. Et ce n’est que le 17 juillet dernier, que l’ACGP (Administration et Contrôle des Grands Projets) a reçu le dossier.»

Poursuivant, il ajoutera que l’entrepreneur a aussi rencontré des soucis au niveau des impôts à cause de l’expiration de son « quitus » et dont-il devait renouveler pour être en règle.

« C’était aussi pareil aux impôts. Il disait avoir payé l’argent mais n’avait toujours pas pu renouveler son quitus à cause du circuit qui est long », explique Mr Koné, avant d’ajouter : « J’ai appelé Dr Sandali Keita (ndlr, Directeur des Moyennes Entreprises) pour lui donner la référence de l’entreprise et son document a été renouvelé.»

Il renchérit ensuite qu’une fois la situation réglée du côté des impôts, l’entrepreneur s’est rendu aux finances pour voir « la DAAF (Directrice administrative des affaires financières) et le contrôleur financier censé engager le paiement de la valeur des 42% des travaux exécutés ». A l’en croire donc « c’est à cause de cet imbroglio que le chantier est encore bloqué.»

« Les choses sont rentrées dans l’ordre », selon le département de tutelle, mais…sur le terrain la vérité est tout autre

Interpellé sur le même sujet, le Secrétaire Général du Ministère de la Communication et de l’Information est catégorique. Selon lui, l’entrepreneur « avait des documents qu’il devait fournir » avant d’être payé. Et que même si ces documents qui devraient servir de « garantie bancaire » avaient été (finalement) fournis, mais « le processus ayant été long…le temps est passé ». Donc, précise Souleymane Thianguel Bah, « la société n’avait plus une bonne garantie bancaire…il fallait donc refaire la garantie… ». Raison pour laquelle, se justifie-t-il, « on ne pouvait plus engager le processus de paiement.» Qu’à cela ne tienne, il rassurera que « là normalement les choses sont rentrées dans l’ordre… », et pense à cet effet que « le paiement doit être soit au niveau du trésor soit au niveau de la banque centrale ». Ainsi donc pour  Thianguel Bah « les choses » étant « régularisées entre temps et le processus…suivi », l’entrepreneur est « censé recevoir son avance de paiement de démarrage » qui lui permettra aussi de « continuer les travaux.»

Un entrepreneur déçu du manque de volonté de l’Etat

Quatre mois se sont écoulés depuis cette annonce du secrétaire général, l’entrepreneur n’est toujours pas payé. Et les travaux de construction sont toujours en arrêt. Sans aucun signe d’espoir à l’horizon. Pendant ce temps, on continue de faire croire que si la facture de l’entrepreneur n’est pas encore payée, ce dernier aussi a sa part de responsabilité. Vrai ou faux ?

Nous cherchons alors à rentrer en contact avec le concerné. Après deux (2) mois de tentatives infructueuses, nous parvenons à joindre le PDG de la société Falibra BTP, le maitre d’œuvre du chantier. L’homme semble surpris de la mauvaise fois de l’Etat.

S’exprimant sur le sujet, M.Falilou Diallo tiendra à rappeler les clauses du contrat, selon lesquelles l’Etat était censé payer une avance pour le démarrage des travaux. Mieux, face au refus de l’Etat de s’acquitter, le jeune entrepreneur dit avoir pris le risque de les préfinancer. En revanche, lorsqu’il a voulu se faire rembourser, l’Etat a trouvé moyen de lui durcir la procédure. Sous prétexte que son quitus n’est pas à jour, qu’il doit le renouveler.

« Dans le contrat » qui lie les deux parties, l’Etat était censé payer une avance pour permettre à l’entrepreneur de « commencer les travaux », a rappelé Mr Diallo. Cependant pour des raisons inavouées, l’Etat n’honorera pas cet engagement, regrette-t-il. Mais ce manque de volonté des autorités ne lui décourage pas. Alors, confie-t-il, « j’ai dit à mes collègues » de travailler et « attendre le paiement.»

Malgré sa bonne fois, M. Diallo sera déçu du « manque de volonté notoire » de l’Etat pour le rembourser. Constatant cela,  il décide alors « d’arrêter les travaux » jusqu’à ce que l’Etat  veuille s’acquitter.

« Quand on vous dit que nous n’étions pas en règle…, tout quitus a une date de validé…de six mois. Et au moment où nous, on engageait pour le paiement, ça trouvé que le quitus a expiré il y a juste 3 jours. Mais, tous les paiements » pour le renouvellement étaient déjà « à la banque…. Donc le processus était en cours pour avoir le quitus… », souligne l’entrepreneur.

Selon lui, la procédure a pris trop de temps. Sinon, confie-t-il, les quittances de paiement pour le renouvellement du quitus sont déposées depuis longtemps. « Tout ce qui reste, c’est l’impression du quitus », révèle Mr Diallo. Qui estime qu’il fallait juste une petite volonté de la part de l’Etat pour imprimer le document. Mais hélas ! Il a fallu beaucoup de tractations pour obtenir le fameux sésame.

La « la lettre de paiement » finit par atterrir sur la table du ministre de l’économie et des finances. Là également ça été pour lui la croix et la bannière. L’attente sera plus longue que prévue avant la signature de la lettre. Qui est ensuite transmise à la Banque Centrale de Guinée avec un ordre de paiement.

Dans la journée de ce mercredi 15 novembre 2023, l’entrepreneur faisait encore les pieds de grue dans les locaux de la banque centrale dans l’espoir de se faire payer.

Dans tous les cas, suite aux récents espoirs que cela avait suscité, il prévoyait la reprise effective des travaux au début du mois de novembre. Mais il n’a pu honorer cette promesse du fait du retard qu’accuse le paiement. Et jusqu’au moment où nous mettions cet article en ligne, les travaux n’avaient toujours pas repris.

Des travailleurs désenchantés face à la fausse promesse du colonel Mamadi Doumbouya  

Du côté du personnel de Horoya, c’est la déception totale. Les travailleurs sont désormais dans l’incertitude et la résignation. Ne croyant plus à la fameuse promesse faite par le président de la transition, ils préfèrent ne plus en parler. Convaincus que la rénovation du mythique siège du quotidien national Horoya ne fait pas partie des priorités des autorités. Notamment du département de tutelle où la ministre Aminata KABA préfère plutôt équiper une maison sans toit que de consentir des efforts pour restaurer un siège, fut-il un symbole dans l’histoire de la presse en Guinée. Relégué au dernier plan, le quotidien Horoya serait devenu un hebdomadaire qui ne parait qu’une fois par semaine au grand dam de ses fidèles lecteurs.

Siège très vétuste en abandon

Le siège de Horoya a été saccagé puis pillé par des inconnus, le 5 septembre 2021, c’est-à-dire le jour même de la prise du pouvoir par le Comité National du Rassemblement pour le Développement, acronyme du CNRD. Et le chef de la transition, en visitant le site, trois mois plus tard, avait fait la ferme promesse de le restaurer. Près de 2 ans après cet effet d’annonce, le site n’est toujours pas rénové. Enquête à suivre.

Samory Keita pour kibanyiguinee.info

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