En Guinée, il ne se passe plus un jour sans qu’on assiste au baptême de feu d’un mouvement de soutien au CNRD et à son président, le général de corps d’armée Mamadi Doumbouya.
À une exception près, la plupart des mouvements sont parrainés par des hauts percés au Sommet de l’État. Chaque ministre ou haut commis de l’État aurait un mouvement qu’il parraine.
Gros dépensiers, ces mouvements qui saignent aujourd’hui l’économie nationale, sont financés à coup de centaines de millions de francs guinéens. Sans que cela ne puisse déranger quelqu’un.
Au contraire, ils sont fortement encouragés et entretenus par des personnalités qui se trouvent au plus haut niveau de la sphère étatique.
C’est d’ailleurs devenu l’un des moyens les plus sûrs pour s’offrir une opportunité d’emploi ou de se faire facilement de l’argent.
On a plus besoin d’être un sorbonnard ou un diplômé d’Harvard encore moins, d’être intègre ou compétitif. La seule compétition qui compte aujourd’hui en Guinée, c’est la capacité à mobiliser autour des idéaux du CNRD. Plus on mobilise, plus on augmente ses chances de décrocher un poste juteux et de brasser des sous.
Certains artistes qui ont très tôt compris l’astuce, ont vite sauté sur l’occasion, profitent depuis, largement de la situation. Takana Zion, Singleton, Fodé Kouyaté ne diront pas le contraire.
Un système bien huilé qui a fini par happer tout le monde. Les citoyens qui tirent le diable par la queue dans une transition qui bat de l’aile n’ont meilleurs choix que de s’adapter. Hommes politiques, autorités morales, religieux, citoyen lambda etc. Tous sont automatiquement devenus des fervents soutiens du CNRD.
On agit sans vergogne au su et vu tout le monde, tant pis pour les intègres qui se soucient encore de l’avenir du pays.
La floraison des mouvements de soutien sur le terrain en fait foi. Un foisonnement de mouvements qui rappelle l’ère Conté avec le fameux MOSALAC (Mouvement de soutien à Lansana Conté). On connait la suite.
Aujourd’hui, la création de tous ces mouvement fantômes, ouvre indéniablement le boulevard à la junte militaire qui ne compte plus s’éloigner des délices du pouvoir. Car le retour à l’ordre constitutionnel ne serait plus pour elle, une préoccupation majeure. Les politiciens qui veulent parer au plus presser, devraient s’accommoder à la situation et garder leur mal en patience.
Pour l’instant, la préoccupation du CNRD semble être ailleurs. C’est de dérouler tranquillement son propre agenda, devenu un secret de polichinelle. C’est-à-dire, garder de gré ou de force le pouvoir en imposant la candidature du général Mamadi Doumbouya.
Les détracteurs qui s’apprêtent à parler de parjure peuvent déjà se mordre les doigts. Ce qui ne dérangerait nullement le CNRD, qui pourrait justifier sa démarche en disant que cela n’a pas commencé par son pouvoir.
Mieux, le parjure étant devenu un fait banal dans le comportement des chefs d’Etat Africains, l’homme du 5 septembre 2021, n’aura pas à se faire trop de soucis. La promesse n’est pas une montagne qu’on doit forcément déplacer. Revenir donc sur sa parole ne saurait être un crime.
D’ailleurs, les nombreux soutiens qui fusent de partout seront là pour le justifier. Ils poussent ici et là comme des champignons et sont devenus un phénomène qui touche tout le pays. « La fièvre Doumbouya s’est emparée de tout le monde », délirait récemment un cacique du pouvoir.
Certains de ces mouvements sont facilement reconnaissables rien qu’à travers leur simple appellation. D’autres par contre, comme faire l’Autruche, jouent encore à la sournoiserie. Cela même si l’évidence crève les yeux. Ils attendraient d’avoir un véritable parrain avant de laisser tomber leur masque qui ne tiendrait pourtant qu’à un petit fils.
Parmi ces mouvements, on peut citer, entre autres, le Front National pour la Défense de la Transition (FNDT), le mouvement Actions Concrètes Won Gbo Eybè, le mouvement Djonkein Doumbouya, le mouvement Atéwala (il ne quitte pas), le mouvement Doumbouya doit rester, le Comité national de soutien de la transition guinéenne (CNSTN), le mouvement Honneur et fidélité, les patriotes engagés etc. Sans oublier celui des anciens ministres du CNRD.
Comme le ridicule ne tue pas, des anciens commis de l’État qui sombrent dans la galère depuis leur éviction pour incompétence du gouvernement, pour attirer l’attention de leur bienfaiteur, ont mis en place un mouvement dénommé : le collectif des anciens ministres du CNRD.
C’est même devenu un phénomène qui touche désormais toutes les régions du pays. Cela depuis que les communautés après avoir longtemps souffert de leur opposition vis-à-vis de certains régimes, et tiré les leçons du passé, ont compris que pour profiter des avantages de l’État, il faut être coopérant et ouvert au régime. Et que ce n’est qu’à travers ce rapprochement qu’on peut bénéficier d’appui étatique pour le développement de sa localité. Comme la construction des routes, hôpitaux, écoles, marchés, d’ouvrages de franchissement etc.
L’on se souvient encore que, c’est sous Alpha Condé, plusieurs localités ont bénéficié de leur première couche de bitume après avoir simplement exprimé leur soutien au régime. L’astuce étant comprise, plus personne ne voudrait rester à la traine par le simple fait d’une position. Qui est fou !
C’est un véritable « chantage politique » auquel se livre aujourd’hui le CNRD, mais qui vaut son pesant d’or pour des citoyens qui ne savent plus où donner de la tête.
Sidafa Keita pour kibanyiguinee.info